Contestation du prix de vente par le syndic de copropriété : les points essentiels à retenir
Contestation du prix de vente par le syndic de copropriété : les points essentiels à retenir
Lors de la cession à titre onéreux d’un lot en copropriété, le syndic peut s’opposer au versement des fonds au vendeur dans un délai de 15 jours suivant la réception de l’avis de mutation envoyé par le notaire. Cette procédure vise à garantir le paiement des sommes dues par le copropriétaire sortant (Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, article 20).
L’opposition au prix de vente a deux objectifs principaux :
- Activer le privilège immobilier spécial – devenu une hypothèque légale spéciale après la réforme du droit des sûretés.
- Bloquer le paiement du prix de vente afin de protéger les droits financiers du syndicat des copropriétaires.
Cependant, pour être valide, cette opposition doit respecter des exigences de forme strictes prévues par l’article 5-1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967. Elle doit détailler précisément :
- Les créances prioritaires : montants et causes des créances dues pour l’année en cours et les deux dernières années échues.
- Les créances antérieures : montants et causes des créances des deux années précédant celles mentionnées ci-dessus.
- Les créances hypothécaires : garanties par une hypothèque légale, mais non incluses dans les créances prioritaires.
- Les autres créances : non couvertes par les catégories précédentes.
Conséquences d’une opposition irrégulière
Un manquement à ces exigences formelles n’entraîne pas automatiquement la nullité de l’opposition. Toutefois, cela peut altérer le statut des créances. Ainsi, les créances qui ne respectent pas les distinctions prévues peuvent perdre leur caractère de créances privilégiées ou superprivilégiées. Ces créances ne pourront être invoquées qu’en tant que créances hypothécaires ou chirographaires, c’est-à-dire sans priorité particulière (Cass. 3e civ., 15 décembre 2004, n° 03-15.174 ).
Un exemple jurisprudentiel récent
Dans un arrêt du 12 octobre 2023 (Cass. 3e civ., 12-10-2023, n° 22-18.723), la Cour de cassation illustre ces principes. Dans cette affaire, le syndic avait adressé une opposition au notaire pour réclamer des charges de copropriété impayées lors de la vente de plusieurs lots. Bien que l’opposition mentionnât le montant total de la créance et contînt un extrait de compte des copropriétaires, elle ne respectait pas l’obligation de distinction entre les quatre types de créances.
Les vendeurs ont contesté la régularité de cette opposition et saisi les tribunaux pour obtenir sa mainlevée. La cour d’appel a estimé que l’opposition était régulière et a condamné les vendeurs à régler le montant réclamé. Cependant, la Cour de cassation a cassé cette décision, estimant que le défaut de distinction entre les créances constituait une irrégularité formelle privant le syndicat du bénéfice de l’hypothèque légale spéciale prévue à l’article 2402 du Code civil.
Pour préserver leurs droits et garantir l’efficacité des oppositions, les syndics de copropriété doivent s’assurer que leurs demandes respectent rigoureusement les exigences formelles établies par la réglementation. À défaut, les créances pourraient perdre leur priorité légale, exposant le syndicat à des difficultés pour recouvrer les sommes dues.
Maître Elisabeth HANOCQ – Avocat AVIGNON – Cour d’appel de NIMES – Droit immobilier