On sait que les époux sont solidairement tenus au paiement des impôts du couple, sans qu’il soit tenu compte des revenus ou du patrimoine imposable de l’un ou de l’autre.

Une réponse ministérielle (Rép. min. n° 40560  ; J.O. A.N. 5 octobre 2021, p. 73827) rappelle qu’une décharge de solidarité peut être demandée, en particulier en cas de séparation ou de divorce, à certaines conditions (réalité de la rupture de la vie commune, comportement fiscal irréprochable, disproportion marquée entre la dette fiscale et la situation patrimoniale du demandeur).

La réponse précise que, pour l’appréciation de cette dernière condition, il n’est pas tenu compte de la résidence principale de l’époux demandeur et que la contestation de cette appréciation relève de la compétence du juge administratif.

 

« L’imposition commune des personnes physiques au niveau du foyer est un des fondements du droit fiscal français. La solidarité de paiement en est le corollaire et constitue l’une des garanties de l’effectivité du recouvrement. La loi n° 2007-1822 de finances pour 2008 a modifié le régime de la solidarité fiscale, en instituant, sous certaines conditions, un mécanisme de droit à décharge de responsabilité solidaire (DRS) au profit de l’ex-conjoint ou de l’ex-partenaire lié par un PACS tenu au paiement de l’impôt sur le revenu, de la taxe d’habitation et de l’impôt de solidarité sur la fortune. Ce texte a abrogé les articles 1685 et 1685 bis du code général des impôts (CGI) qui prévoyaient seulement une possibilité pour chacun des conjoints ou partenaires de solliciter une décharge gracieuse de responsabilité solidaire pour le paiement de la taxe d’habitation et de l’impôt sur le revenu. Le nouveau dispositif, codifié sous l’article 1691 bis du CGI, prévoit désormais des conditions spécifiques de recevabilité : la nécessité d’une rupture de la vie commune, la constatation d’un comportement fiscal exempt de toute critique et l’existence d’une « disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur ». Lors des débats parlementaires, le législateur a jugé préférable de ne pas définir de façon trop précise les critères permettant de qualifier la condition tenant à la disproportion marquée, afin de laisser à l’administration une certaine souplesse d’appréciation, lui permettant de tenir compte des circonstances propres à chaque situation particulière. Il a été ainsi décidé que les modalités d’appréciation de cette condition seraient définies plus précisément par instruction. Tel est le cas pour apprécier la situation financière et patrimoniale, nette de charges, à la date de la demande de décharge, l’objectif étant d’appréhender au mieux la faculté contributive du demandeur, compte tenu de ses revenus, de ses charges, de la valeur de son patrimoine, déduction faite des dettes qui le grèvent. Il en va de même du rapport entre la dette fiscale et la situation financière et patrimoniale devant être regardé comme manifestant une disproportion marquée. L’instruction commentant les modalités d’appréciation des nouveaux critères prévus par ce dispositif a été publiée le 20 avril 2009 (BOI n° 5 B-13-09) et complétée par diverses notes de service. En pratique, l’examen de l’existence d’une telle disproportion s’effectue au cas par cas, d’abord au regard de la situation patrimoniale. À cet égard, l’administration exclut toujours la prise en compte de la résidence principale de la personne demandeuse pour apprécier l’existence ou non de la « disproportion marquée ». L’appréciation qui est faite, au cas par cas, par l’administration sur la disproportion marquée peut être soumise au juge administratif garant du traitement équitable des demandeurs. Les modalités actuelles de mise en œuvre de ce dispositif répondent donc à la volonté du législateur qui était d’instaurer une procédure encadrée pour la personne divorcée et délaissée justifiant être dans l’incapacité de faire face au règlement de l’impôt commun. Le nombre limité de recours en contestation des décisions prises dans ce cadre par les services, soit auprès de l’administration centrale de la direction générale des Finances publiques (une quinzaine par an en moyenne) ou devant le juge (environ 30 instances déférées en appel entre 2014 et 2020), dont une partie donne d’ailleurs lieu à correction favorable à la personne demandeuse, tend à accréditer que l’essentiel des demandes débouche sur une issue donnant satisfaction au demandeur. Enfin, une ouverture plus large du droit à DRS pourrait remettre en cause l’égalité de traitement avec les personnes placées dans la même situation financière mais qui n’étant pas séparées, ne peuvent avoir droit à aucune décharge, voire encourager la connivence de contribuables simulant une situation de séparation, afin d’échapper par ce biais au recouvrement de leurs dettes, et pourrait constituer une remise en cause du principe même de la solidarité de paiement des époux et des partenaires liés par un pacte civil de solidarité qui découle de l’imposition par foyer. »

Maître Elisabeth HANOCQ – Avocat au Barreau d’AVIGNON – Cour d’appel de NIMES

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