Successions : La Révocation de donation
La révocation d’une donation peut être annulée si elle vise à contourner l’article 922. C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 30 novembre 2022.
Le contexte juridique : l’article 922 du Code civil
L’article 922 du Code civil garantit la protection de la réserve héréditaire. Il impose de calculer la quotité disponible en reconstituant fictivement le patrimoine du défunt :
- Les biens donnés sont réintégrés dans la masse successorale
- Leur valeur est appréciée au jour de l’ouverture de la succession
- En cas d’aliénation ou de subrogation, la valeur des nouveaux biens est prise en compte
Ainsi, le législateur évite que certaines donations portent atteinte aux droits des héritiers réservataires.
Les faits : une révocation de donation contestée
Dans cette affaire, une défunte avait trois enfants. Le 9 juin 1994, elle avait fait une donation à son fils « par préciput et hors part ». Le bénéficiaire avait immédiatement investi ces fonds dans des sociétés civiles immobilières (SCI). Les titres ainsi acquis avaient pris une grande valeur au fil des ans.
Le 11 juillet 2005, par acte notarié, la donatrice et son fils avaient convenu de révoquer la donation. Le fils avait alors remboursé la somme initialement donnée. La sœur du donataire contesta cette révocation. Elle invoqua une fraude visant à éluder les règles successorales.
L’objectif de la contestation
Deux points étaient en jeu dans cette procédure :
- Réintégrer la donation dans la masse successorale pour la calculer à sa valeur au moment du décès (nettement supérieure à celle initialement donnée).
- Obtenir une sanction pour recel successoral si une fraude était avérée.
La décision des juges
La Cour d’appel avait rejeté la demande. Elle estima que :
- Les motifs de la révocation étaient indifférents.
- Une révocation amiable d’une donation était librement possible, sans avoir à justifier des raisons.
La Cour de cassation a annulé cette décision. Elle a rappelé un principe essentiel : un contrat n’est valable que si la cause qui a déterminé les parties à agir est licite. En l’espèce, les juges d’appel n’avaient pas recherché si la révocation visait à contourner les dispositions impératives de l’article 922 du Code civil.
Les juges doivent examiner les motifs réels des parties lorsqu’un acte de révocation est conclu. Si la révocation a pour but de détourner les règles successorales, elle peut être annulée pour cause d’illicéité.
Référence : Cass. 1re civ., 30 nov. 2022, n° 21-11.507, FS-B.
Maître Elisabeth HANOCQ – Avocat au Barreau d’AVIGNON – Cour d’appel de NIMES – Droit des successions.